190606 News genedrive

Vidéo sur les risques liés au forçage génétique. Image: SWISSAID/Youtube

Dans le cadre d’un symposium sur le forçage génétique qui a eu lieu à Berne, des experts internationaux ont publié un rapport détaillé sur les applications du forçage génétique, ses aspects techniques, sociaux et éthiques et légaux. Ils concluent que cette nouvelle technique permet potentiellement de modifier de façon permanente ou d’éradiquer des espèces sauvages. Compte tenu du manque de connaissances sur les impacts négatifs de cette technique sur la biodiversité et les écosystèmes, les experts recommandent un moratoire sur la dissémination d’organismes forcés génétiquement. Ils soulignent également l’urgence de soumettre le forçage génétique à une réglementation internationale efficace et juridiquement contraignante.

Afin de garantir un débat objectif, des experts des domaines des sciences du vivant, des sciences de l'environnement et de l'agriculture, de la philosophie et du droit ont rassemblé dans un rapport complet les connaissances actuelles sur les applications du forçage génétique, ses aspects techniques, sociaux et éthiques et légaux. La publication de ce rapport est soutenue par trois organisations scientifiques : Critical Scientists Switzerland (CSS), European Network of Scientists for Social and Environmental Responsibility (ENSSER) et Federation of German Scientists (FGS/VDW).

La technique du « forçage génétique », « gene drive » en anglais, est basée sur l'utilisation des ciseaux moléculaires CRISPR/Cas. Elle entraîne une réaction de mutation en chaîne qui permet de modifier génétiquement des animaux sauvages et même d’éradiquer des espèces entières. Le forçage génétique permet à l'homme de forcer la transmission de mutations ou de gènes synthétiques d’une génération à l’autre dans des organismes sauvages en outrepassant les règles classiques de l'hérédité (voir ici pour plus de détails).

Bien que le forçage génétique n'existe encore qu'en laboratoire, les médias et les publications scientifiques font déjà de grandes promesses sur ce que cette technique pourrait accomplir. Les attentes des scientifiques et des donateurs sont donc élevées. Mais modifier volontairement une ou des espèces sauvages par la dissémination d’organismes forcés génétiquement est une action irréversible qui ne s'arrête pas aux frontières nationales. "La réglementation actuelle en matière de biosécurité est inadéquate et n'est pas entièrement équipée pour faire face aux risques uniques liés au forçage génétique", déclare Lim Li Ching, expert en réglementation internationale et l'un des auteurs de l'étude. Tant qu'une réglementation internationale efficace et juridiquement contraignante n'aura pas été mise en place, la dissémination d'organismes génétiquement forcés devrait être interrompue, recommande l'étude.

Le rapport souligne également que le discours éthique sur le forçage génétique ne devrait pas se limiter à discuter l’utilisation ou non de cette technique mais devrait tenir compte du développement de solutions alternatives. Ainsi, d'autres solutions, plus durables et moins risquées que la modification génétique d'une population de plantes ou d'insectes, sont souvent disponibles ou en phase finale de développement. Mais elles ne bénéficient pas toujours du soutien politique ou des ressources nécessaires à leur développement et à leur application.

Finalement, l'utilisation du forçage génétique pour des applications militaires nécessite de toute urgence l'attention du public.

DOCUMENTS STOPOGM

  • StopOGM Infos 66
    Nouvelles techniques de modification génétique. Les mêmes promesses qu'il y a 20 ans
    Protéger les espèces à l'aide de manipulation génétiques ?

 

RAPPORT

Dialogue transatlantique des consommateurs, 2017

Commission d'éthique dans le domaine non humain :

Descriptions des techniques et risques

Prise de position de scientifiques

Expertises juridiques et régulation