21.04.2014 | Disséminations expérimentales en Suisse

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L’essai en plein champ ne sert à rien dans l’optique d’une recherche variétale axée sur la durabilité. Photo : Roland zh

L'Office fédéral de l'environnement (OFEV) a approuvé une demande de l'Institut de microbiologie végétale de l'Université de Zurich visant à semer du maïs génétiquement modifiée (GM) dans les champs de la station de recherche sécurisée d'Agroscope à Reckenholz, Zurich en mai 2020. Cette expérience est inutile, chère et ne contribue pas au développement d'une agriculture suisse durable.

Le gène Lr 34 du blé a été ajouté par génie génétique (transgenèse) à une variété de maïs qui devra être cultivées pendant trois ans (2023) sur le "site protégé" à Zürich Reckenholz. En conditions contrôlées (sous serre), ce gène confère une résistance partielle aux maladies fongiques, mais semble garder son efficacité sur le long terme. Les expériences de dissémination visent à tester la résistance de ces plantes transgéniques en plein champ. L'action du gène dans la résistance aux champignons n'est pas encore claire. Par exemple, l'introduction de ce gène étranger dans le maïs pourrait avoir des effets physiologiques secondaires involontaires non connus et non souhaités.

L'Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique, qui s'engage depuis des décennies en faveur d'une agriculture agroécologique et d'une sélection variétale adaptée à ces systèmes, est très critique face à cette dissémination. À notre avis, malgré des coûts élevés, les essais n'apportent aucune contribution à la mise en place d'agrosystèmes durables en Suisse. Le maïs GM est conçu pour la culture intensive du maïs à grande échelle. Dans ces conditions, l’expérience nous montre que les résistances sont cassées rapidement par les pathogènes avec pour corollaire que ces derniers deviennent de plus en plus résistants. De plus, les maladies fongiques à tester ne présentent pas de danger aigu en Suisse. En effet, elles peuvent être évitées grâce à la culture de variétés résistantes non GM et à l'adaptation des conditions de culture selon Agroscope.

La Loi sur le génie génétique dans son article 7 est garante "d'une protection de la production exempte d’OGM ainsi que du libre choix des consommateurs". Dans ce contexte, le maïs GM n'a aucun futur en Suisse puisque sa culture engendrerait fort probablement la contamination des filières conventionnelles et biologiques. En effet, sur le territoire helvétique, les petites parcelles sont enchâssées les unes dans les autres et une contamination des filières est inévitable avec tous les dégâts économiques qui y sont liés. En outre, l'acceptation des plantes GM en Suisse est faible et leur potentiel commercial très faible.

Pour être autorisée, une dissémination doit contribuer à la recherche sur la sécurité biologique des OGM (LGG article 6). Or, sous sa forme actuelle, l'expérience ne répond pas, selon nous, à ces exigences. Par exemple, il est prévu d'étudier les effets du transgène sur les champignons mycorhiziens vivant en symbiose avec les racines de maïs. Mais, selon les auteurs de la demande, il n'est pas clair si le gène Lr34 est réellement exprimé dans les racines. En l'absence d'une certitude de l'expression du transgène dans les racines, étudier son impact sur des champignons mycorhiziens racinaires n'est pas du tout pertinent. De plus, le protocole pour la réalisation de ces expériences n'est pas décrit. La recherche sur les questions de biosécurité liée aux OGM n'est donc pas prise au sérieux par les requérants et en dit long sur leur considération pour le sujet. Elle ne figure dans la demande que parce qu'elle est obligatoire. Il est à notre sens très surprenant et aussi très dommageable que l'OFEV valide ce genre de proposition d'une qualité scientifique déplorable.

Les résultats et les publications (s'il y en a) résultant des essais profiteront principalement à l'équipe de recherche du candidat et à ses partenaires puisqu'ils détiennent un brevet sur le gène Lr34. Au vu de l'urgence du changement de paradigme agricole à opérer, avons-nous vraiment les moyens de gaspiller 750'000 CHF par an pour des expériences inutiles et des expériences sur la biosécurité mal conçues et alibi ?